Le bruit d’une dague rentrée dans son fourreau suivit d’un bruit étouffé de chute. Pour la dernière fois ce jour-ci, Irrbryn venait de mettre ses talents à l’épreuve et rentrait chez elle sans un bruit. Une Sombre parmi d’autres, élevée par une mère impitoyable, cruelle, et désireuse de transmettre cet héritage à son unique fille.
Il semble d’ailleurs qu’elle y soit parvenue. Rarement un sourire éclaire le visage d’Irrbryn, rarement pose-t-elle son regard sur un représentant des races inférieures. Elle a apprit avec brio à se servir de ses lames tout au court de sa jeunesse. Une jeunesse apparemment sans histoires. Certes, il y eut quelques rumeurs … Il est vrai qu’elle fut la dernière à avoir vu son père avant sa mystérieuse disparition, et on les avait alors entendu se disputer violemment – Irrbryn ayant aussi hérité de sa mère la certitude de l’infériorité des mâles. On ne peut non plus oublier que l’unique jeune sombre dont les compétences rivalisaient avec les siennes lors de son apprentissage perdit l’usage de ses jambes dans un tragique accident. Ni encore que sa propre mère sombra dans une folie inexpliquée quelques mois après qu’Irrbryn et elle se soit querellée au sujet de son futur.
Mais tout ceci n’est que rumeur, rien de prouvé, bien évidemment. Et bien des années ont passés depuis.
Irrbryn. Mot pour mot l’assassin masqué.
Le nom qu’elle s’est choisie lorsqu’elle quitta le foyer familial. « Assassin » est assez caractéristique de l’odieuse précision avec laquelle elle use de ses lames. « Masqué » pour mettre en garde ses interlocuteurs. Car la Sombre a bien apprit sa leçon. Le moindre de ses mots, le moindre de ses gestes, de ses expressions sont destinés à servir ses intérêts. Nul ne peut prétendre connaître cette elfe aux multiples visages. Mais s’il se trouve que vos intérêts sont les siens, elle peut se révéler une alliée précieuse.