[Elfe] Nienna Lumaë

Spoiler:

Chapitre I
Adoption

Il y a un peu moins de trois cent ans, au cœur de la Vallée Enchantée. Un long hurlement retentit, comme un appel. En quelques minutes à peine, la meute se rassemble. Au centre du cercle formé autour d'un des nombreux cristaux étranges de la Vallée, la femelle dominante, une belle louve au poil gris rayé de noir, et au regard jaune perçant propre à son espèce, est penchée sur une petite forme recroquevillée. Alors qu'elle la renifle, cette dernière est secouée d'un soubresaut qui ressemble fort à un éternuement. Elle est minuscule devant la grande femelle, mais ressemble cependant à un modèle réduit de celle-ci. C'est un louveteau, une femelle plus exactement, à la fourrure d'un noir brillant qui semble, au gré de certain reflet, viré vers le bleu. Ses yeux, à peine ouvert, brillent cependant d'un bleu aussi pur que les plus belle nuit.

La louve, Imala, use de son museau pour retourner le petit animal dans tout les sens. Elle n'est pas normale. D'une part, nous sommes en septembre. Aucune femelle ne mettrait bas à cette période, alors que les températures chutent et que le climat se fait rude. D'autre part, un loup n'abandonne pas sa progéniture. Jamais. Parfois, certes, des loups sont écartés d'une meute. Mais des loups presque adultes, qui montrent trop d'ambition, mais pas des nouveaux-nés.

Et enfin, le plus important, elle porte déjà l'odeur de la meute. Comment cela se pourrait-il ? Elle sait bien que ce n'est pas un de ses enfants. Mais elle est la seule à se reproduire, et cette année encore, elle a étroitement surveillé les autre femelles de la meute, elle est sûre qu'aucune n'a dérogé à la règle ...

Mais malgré tout cela, l'instinct est plus fort. Elle est une mère, elle a déjà plusieurs portée derrière elle, et si ce louveteau porte l'odeur de la meute, alors c'est qu'elle en fait partie.

Soudain, un loup se détache du cercle. Ce n'est pas le plus grand, mais c'est sans aucun doute le plus noble, le plus beau. Il a le dos gris, qui s'éclaircit progressivement vers le blanc parfait qui orne son ventre et ses flancs. Son regard semble pouvoir voir bien plus qu'un œil humain, et sa posture donne l'impression d'être toujours aux aguets, de pouvoir tout percevoir de son environnement. Il s'approche d'Imala et, en guise de salut, la mord sans force juste au dessus de l'épaule. Puis, il baisse le museau et, à son tour, examine la petite boule de poil. Puis, d'un geste, il met fin à tout suspense.

D'un geste délicat, il ferme la mâchoire sur la nuque du louveteau, la portant ainsi. Lentement, il se retourne ensuite, et fait plusieurs fois le tour du cercle, passant devant chacun de ses congénères. Et, enfin, il re-dépose son chargement devant l'un des mâles les plus anciens de la meute, sans doute le plus expérimenté après lui-même. Il vient de désigner la nourrice.

Ce dernier se baisse alors et, de quelques coups de langue, la marque de son odeur. Puis, tous se dirige vers la tanière de la meute, au plus profond de la Vallée. Plus haut, sur un des nombreux plateaux, une des fées majeures de la Vallée s'éloigne en sens inverse, l'air satisfaite.

Chapitre II
Première chasse

Presque un an a passé depuis ce jour, et la petite louve trouvée, baptisée Luin par la meute, avait atteint l'âge de sa première chasse. C'était une nuit de pleine Lune, particulièrement propice à cet exercice. Elle suivait de près la louve Alpha, qui s'était elle-même chargée de lui enseigner les bases d'un traque en meute. Luin était encore plus petite que les autres loups qui étaient nés la même année, non seulement parce qu'elle était née au moins quatre mois plus tard, mais aussi parce qu'elle semblait grandir moins vite que la normale. Cependant, elle avait survécu à son premier hiver, et c'était déjà une très grande victoire pour une louve née peu avant l'automne. Il faut dire aussi qu'il avait été particulièrement doux ...

Se tenant basse sur ses pattes arrières, elle suivait du regard la proie indiquée par la meneuse. C'était un cerf seul, dont Imala avait su voir qu'il boitait légèrement, même si un œil humain en aurait été incapable. Les deux autres chasseurs étaient parti dans une autre direction, ce seraient eux les rabatteurs. Luin devrait donner le coup de grâce, sous le regard protecteur de la dominante.

Soudain, un craquement donna le signal du départ. Le cerf releva brusquement la tête et, aussitôt, s'enfuit. L'instant d'après, les deux autres loups bondirent d'un bosquet, obligeant la proie a changer de direction. Il avait fait leur travail, le cerf se jetait droit vers elle. Elle banda tout ses muscles, intimidée par la taille de la bête mais déterminée. Alors que l'animal se rapprochait suffisamment, elle bondit en avant, droit vers le cou du paisible herbivore. Mais au dernier moment, celui-ci la vit venir et, tournant la tête, envoya ses bois couper la course de la louve. Celle-ci, en plein saut, ne put esquiver. Par chance, le choc fut violent, mais le bois ne s'enfonça pas dans sa chair. Elle roula sur le sol, sonnée.

Mais alors qu'Imala allait prendre le relais, guère surprise par ce premier échec, elle se releva et commença à poursuivre leur proie. Intéressé par un tel acharnement, Imala abandonna la course et se contenta d'observer. Luin rattrapait déjà le cerf. Évitant un coup de sabot, elle riposta en mordant le mollet qui avait frôlé son crâne l'instant d'avant. Quand il reposa sa patte au sol pour prendre son prochain appui, la douleur foudroyante qui arriva fit chuter l'animal. Aussitôt, la louve se jeta à son cou, et ses crocs s'enfoncèrent dans sa chair. Le liquide poisseux se mit à s'écouler sur sa fourrure, et le goût du sang décupla son ardeur. Elle serra plus fort encore sa mâchoire et, dans un craquement horrible, la nuque de l'animal se broya. Il cessa de se débattre et sa tête tomba sur le côté, raide mort. Cependant, dans sa lancée et de part son inexpérience, Luin continue de serrer la chair entre ses dents plusieurs minutes.

Imala la rejoint et, lorsqu'elle la félicita d'un coup de langue sur la joue, elle lâcha enfin prise.

Chapitre III
Isolement, révélation

Trois ans, presque quatre. Quarante deux mois et Luin semblait enfin atteindre la maturité qu'atteignent certaines femelles au bout de leur première année de vie. L'atmosphère de la meute devenait de plus en plus oppressante. Elle sentait que les autre loups ne la regardait pas normalement. Mais était-elle normale ? Non, sûrement pas. Elle avait l'impression d'être plus jeune qu'elle ne devrait l'être, et ses congénères voyaient la même chose. Jour après jour, elle devenait une étrangère, car elle était différente. Bien trop différente. Elle était forte, plus que certains jeunes plus âgés, mais ça non plus, ça n'était pas normal. Vue la période à laquelle elle était arrivée dans la meute, elle aurait dû être faible. Mais voilà. Elle était plus jeune d'apparence, et pourtant plus forte.

Même Imala s'était éloignée d'elle. Elle qui, au début, s'était occupée d'elle comme si elle était sa propre fille. Soudain, elle trésaillit. Par réflexe, elle sauta sur le côté.

Le loup qui l'attaquait la manqua de peu. Elle le regarda longuement, le jaugea. C'était un jeune de son année. Il y avait toujours eu une rivalité entre eux, comme de la jalousie. Leurs jeux avaient toujours été un peu plus violent que ceux des autres. Mais cette fois-ci, ce n'était pas un jeu. Les babines retroussées, les oreilles rabattues en arrière, la queue levée, il la fixait droit dans les yeux. Il voulait au mieux la chasser, au pire la tuer.

Elle se mit en garde également, et attendit la prochaine attaque. Elle l'évita de justesse et tenta de riposter, en vain. Il était plus rapide. Autour d'eux, quelques loups les regardait, mais aucun n'intervenait. Aucun ne voulait l'aider, pensa-t-elle. Elle partait vaincue. Mais elle se battit quand même. Pendant près d'une demi-heure, se fut un ballet mortel de crocs et de griffes. Elle le toucha quelques fois, se fit toucher bien plus souvent.

Dans un dernier effort, elle bondit vers lui. Sans surprise, il esquiva, mais au lieu de se retourner, elle continua dans le même sens. La patte arrière droite en sang, le flanc ouvert, elle s'enfuit. Droit devant, sans regarder derrière. Elle entendit un long hurlement de victoire. Un sentiment étrange l'emplit. Comme si elle voulait faire quelque chose qui lui était impossible de faire. Physiquement impossible, par nature.

Elle ne sut pas combien de temps elle courut, mais elle s'arrêta quand sa patte blessée ne put plus la porter, s'écroulant et roulant plusieurs fois sur le sol dans son élan. Le monde autour d'elle semblait tanguer, flou et indéfini. Elle ne savait même pas si elle avait quittée la Vallée. Il lui semblait être partie vers le Sud, mais elle n'en était pas sûre.

Soudain, elle sentit une présence. Ce n'était pas un loup, mais ça lui semblait familier. Rassurant. De toutes façons, elle ne pouvait rien faire. Elle attendit. Après quelques minutes, elle sentit un contact chaud sur sa patte. La douleur disparut aussitôt. Elle sentit la plaie se refermer, lentement. Sa vue se fit plus nette, et elle distingua la silhouette penchée sur elle. Cela ressemblait, dans sa forme, à un humain. Ça avait deux jambes, deux bras, se tenait debout. Deux oreilles longues et effilées. Mais sa peau n'était en rien celle d'un elfe. Elle aurait dit un arbre. Une écorce fine et délicate. Ses cheveux semblaient être un entrelacs de lianes fines et de feuilles. Elle s'adressa à elle dans une langue qu'elle comprit. Elle sut plus tard que c'était de l'elfique.
"Bonjour, Nienna. Cela faisait longtemps, tu ne te souviens sûrement pas.
La louve ouvrit de grands yeux incrédules. Elle ne comprenait rien. Qui était-ce ? Que lui voulait-elle ? Pourquoi "Nienna" ? Portant, elle n'avait pas peur. Elle n'essaya pas de s'enfuir. La Sylphe reprit alors.
- Tu dois te poser beaucoup de questions, n'est-ce pas ? Laisse moi y répondre alors.
Elle marqua une pause.
- Tu sais que personne dans ta meute, ton ex-meute pardon, n'est ton parent véritable, n'est-ce pas ?
La louve fixa la créature pour toute réponse.
- Je m'appelle Faya. Et moi, j'ai connu tes véritables parents.
Luin entrouvrit la gueule, sidérée.
- Tes parents sont morts peu avant que la meute ne te trouve dans la Vallée, Nienna. Et ...
Faya versa quelques gouttes d'un élixir inconnu sur le corps de la louve, et presque aussitôt, un halo de lumière dorée l'entoura. Elle se sentit prise d'une douleur étrange, dans tout le corps, puis un instant, elle ne sentit plus rien. Plus rien du tout.
- Et tes parents étaient des elfes, Nienna.
Luin fut prise d'un instant de flottement. Quelque chose clochait. Vraiment. Elle se regarda. Elle manqua de s'évanouir. Son corps avait changé. Si ses parents était des elfes, elle devait en être une aussi.

Et en effet. Elle en était une. Elle posa les mains sur son propre corps, incrédule. Des jambes, des bras, une peau délicate, presque blanche. Des cheveux d'ébène, de la même couleur que la fourrure qu'elle avait il y a encore quelques instants. Instinctivement, elle bougea les lèvres, et un son en sortit. Un son incompréhensible certes, mais un son.
- Ta surprise est tout à fait légitime, reprit Faya. Mais ne t'affole pas, s'il te plait. Je vais t'expliquer tout en détail.
Tu es une elfe, Nienna. La fille d'un couple de druides, plus exactement. Tes parents étaient très proche de la meute que tu viens de quitter. Mais peu avant ta naissance, ils furent pris d'un mal étrange et vicieux. Il dévorait leur corps et leurs âmes, à petit feu, et tout ce que l'on put leur dire à son propos est qu'il serait transmis à leurs enfants.
Tes parents voulaient à tout prix t'épargner cela, Nienna. Alors ils me demandèrent mon aide.
Faya marque une petite pause.
Avant de continuer, je dois t'expliquer qui je suis, moi. Je suis une sylphe. Un "esprit majeur" de cette Vallée. J'y vis depuis près de deux millénaires. D'une manière plus général, on peut dire que je suis une sorte de fée. Mais pas de celles que tu croisais souvent. C'est un peu prétentieux de ma part de dire ça, mais certain cercle druidique de cette région me vouent un culte. Tes parents aussi. Aussi, quand ce mal les frappa, ils implorèrent mon aide.
Je m'occupe rarement des affaires qui ne concernent pas directement cette Vallée, mais pour une raison que je ne suis pas sûre de comprendre moi-même, je décidai de t'aider, toi. Mais je ne pouvais pas les soigner. Tout ce que je pouvais faire était trouver un moyen de te préserver de cette malédiction.
Alors, j'ai pensé à cela. En attendant ta naissance, j'ai élaboré un rituel complexe. Et dès les premiers instants de ta vie, je t'ai transformée en louve.
Elle marqua une nouvelle pause, plus longue, sous le regard ahurie de l'elfe.
Comprends-tu, cette malédiction ne semblait toucher que les elfes. Je me suis dit qu'ainsi, je te protègerai. Et visiblement, j'avais raison. Tes parents ont continuer de s'occuper de toi jusqu'à leur mort, qui arriva hélas quelques semaines plus tard à peine. Alors, je t'ai confiée à la meute. Et te voilà ici, maintenant. Je suis désolée, je ne pensais pas que cela finirait ainsi. Mais c'est aussi bien ... ça aurait forcément fini par arriver.
Nienna resta figée quelques instants. Puis, elle compris ce qu'elle voulait faire quelques minutes plus tard, et qu'elle n'avait pas pu. Des larmes roulèrent sur ses joues. Elle voulait pleurer. Longtemps.

Elle avait l'apparence d'une elfe adolescente, pas encore complètement adulte. Son étrange nature l'avait faite grandir plus vite qu'un elfe, mais moins vite qu'un loup. Ses beaux yeux bleu nuit restèrent embués de larmes plusieurs heures durant. Puis, quand ses sanglots cessèrent enfin, sa voix s'éleva pour la première fois. Douce, pure.
- Que dois-je faire maintenant ?
- C'est à toi de choisir. La vie s'offre à toi sous un nouveau jour. Maintenant que tu sais qui tu es, que tu connais ton histoire, tu devrais pouvoir adopter l'apparence de ton choix en te concentrant simplement un peu. Tu peux rejoindre les elfes, ou rejoindre une nouvelle meute. Ou d'autres choses encore.

Chapitre IV
Nouvelle vie

Vingt années. Vingt années depuis ce jour. Nienna avait choisi la dernière voie. Elle vivait tantôt parmi les elfes, tantôt parmi les loups. Plus souvent avec ces derniers, d'ailleurs. Chaque fois, elle rejoignait une nouvelle meute, et y restait plusieurs années, la quittant chaque fois avant que sa nature ne se trahisse. Elle rejoignait alors une communauté elfe, pour quelques mois à peine, avant de chercher une nouvelle meute, et ainsi de suite.

Elle ne se fit jamais à la vie d'elfe. Même sous cette forme, elle gardait des réflexes, des pensées, des comportements de louve. Elle se présentait même parfois sous le nom de Luin.

Qu'elle soit louve ou elfe, elle était dans les deux cas belle. Et elle attira l'attention de plusieurs mâles, quelque soit l'espèce. Mais sa nature complexe l'empêcha d'en accepter un seul. Certain de ces mâles d'ailleurs se rappelleraient toute leur vie de son refus. D'autres encore n'eurent jamais plus l'occasion de s'en rappeler.



Jusqu'à ce jour, il y a un peu plus de cinquante ans.

C'était dans une forêt du Nord, près de Schuttgart. Pour une raison qu'elle ignorait, un loup semblait l'avoir prise en chasse. C'était un loup blanc, magnifique convint-elle. Mais elle n'était pas d'humeur à jouer. Elle s'était enfuie, mais il était anormalement tenace. Et cela commençait à l'énerver. Elle n'arrivait pas à le semer. Et cela l'énervait encore plus. Elle sentait la neige s'enfoncer sous ses pas. Même si elle avait été plus rapide que lui – et elle n'était pas sûre du tout que ce fut le cas, il pourrait sans problème la suivre à la trace. Alors, elle devait faire quelque chose de plus radicale. Elle accéléra dans un dernier effort, juste de quoi être sûre qu'il la perdrait de vue ne serait-ce qu'un instant. Alors seulement, elle bondit dans un arbre, et se percha, elfe, dans une branche. Et quand il passa, elle lui tomba dessus, une dague à la main. Elle le plaqua au sol, serrant ses jambes autour de ses flancs, mais il se débattait toujours. Elle voulut le tuer sur le champ pour mettre fin à ce jeu ridicule une bonne fois pour toute, et lui apprendre à ne pas courir après n'importe quelle femelle, mais quelque chose la retint.

Et elle comprit quoi l'instant suivant. Quand le loup se transforma en elfe. Elle lâcha sa dague, bouche bée. Elle était persuadée d'être la seule ! Était-ce un rêve ? Mais l'elfe lui parla. Il semblait insolemment calme.
"Et bien Dame...vous êtes vous même capable de prendre forme de loup et vous ne pouvez reconnaître vos semblables qui font de même ?
Elle le fixa un instant et bondit en arrière, le relâchant. Elle le fixa. Ses traits de visages étaient fins et délicats, montrant tout les attraits des elfes mais sans être pour autant exceptionnels. Il mesurait environ 1m75. Ses yeux étaient d'un vert légèrement sombre, ses cheveux blonds lui tombaient au milieu du dos dans une longue queue de cheval. Il portait une armure blanche éclatante, décorée sur le bras droit d'une fleur mauve à cinq pétales.

Elle fulmina, mais ne sut comment réagir. Il reprit la parole en premier, en s'inclinant.
– Je crois que je vous dois des excuses Dame, je me suis quelque peu emporté en vous voyant ainsi courir. J'espère que vous m'accorderez votre pardon.
C'était la goutte d'eau. Elle s'approcha de lui et le gifla violemment.
– Imbécile ! Vous m'avez fait peur ! J'aurais pu vous tuer ! Vous ne réfléchissez jamais avant de poursuivre quelqu'un ?
Elle était énervé, mais en même temps elle se sentait coupable. Elle avait réellement failli le tuer. L'elfe, qui avait failli perdre l'équilibre sous le choc, se redressa.
– Je suis sincèrement désolé Dame...je me nomme Nidhagg Lan'Meluin. J'espère que des présentations éviteront à ce genre d'incident de se reproduire.
Elle voulut l'envoyer promener, mais ne parvint qu'à bégayer.
– Je...je...Mon nom est Nienna...Lumaë... Je...et puis flûte ! Nous n'avons rien à nous dire ! Au revoir !
Elle n'attendit pas plus et fit volte-face, bien décidée à oublier tout cela. Elle était horriblement mal à l'aise, et cela l'énervait encore un peu plus. Mais elle sentit une main retenir son poignet.
– Vous voyagez seule ?
Elle ne put s'empêcher de répondre.
– Je...oui ! Qu'est-ce que cela peut vous faire ?
– Et bien...c'est mon cas également. Peut-être pourrions nous faire la route ensemble ? Où allez vous ?
S'en était décidément trop.
– Nul part !
– Tant mieux, moi aussi. Alors, vous acceptez ?
Cette dernière phrase provoqua quelque chose en elle qu'elle ne comprit pas. Elle se sentit rougir, bien malgré elle.
– Je...bon...d'accord... Mais ne vous avisez pas de recommencer !
Elle dégagea son poignet d'un geste vif et reprit la marche, suivie de près par Nidhagg. Après quelques minutes de silence, il lança :
– Au fait, quand je suis sous forme de loup, vous pouvez m'appeler Kelem !
Elle maugréa et, en quelques secondes, c'était une magnifique louve noire élancée aux yeux d'un bleu légèrement sombre qui filait dans la forêt, suivie par un loup blanc au regard émeraude.

Chapitre V
Nouveau départ

Il y a quelques mois. Un homme et sa louve passent le portail Est de Dion.
Un elfe à la longue chevelure blonde et aux yeux verts, une louve aux yeux bleus et au pelage noir. Cinquante ans qu'ils ne s'étaient plus quittés La rancoeur et la méfiance s'étaient changés en amitié, l'amitié en complicité, la complicité en un amour tendre et fusionnel. Nidhagg caresse du bout des doigts la nuque de son amante. Il observe la ville et ses habitants, habillé de son armure couleur de nacre, se demandant à quoi s'attendre ici. Puis, ils avancent vers le centre-ville.