Nom: Amrael
Race: Elfe
Age:120
Description physique :
Lorsque vous levez les yeux sur cette elfe, vous ne pouvez que reconnaître comme vrai ce que l’on dit de la beauté propre à ces êtres. Sa fine silhouette semble se détacher du reste du paysage le temps d’un battement de cœur. Sa longue chevelure, vogue librement dans son dos, retenue uniquement par un fin ruban à sa base. Par endroit, tel l’écume de mer, quelques perles blanches émergent ci et là au milieu des flots. Si vous la détaillez plus avant, vous laisserez glisser votre regard sur une peau diaphane. Et quand votre regard se pose sur son visage, l’espace d’un instant, vous croirez voir passer un ange, sensation éphémère qui disparaît si tôt apparue. Lorsqu’enfin vous croisez son regard, c’est pour y découvrir tout ce que le reste de son corps semblait présager : deux lacs azur où vous vous noieriez bien volontiers, avec par endroit des paillettes dorées qui sublime l’éclat particulier de ses yeux. C’est alors qu’elle se détourne de vous, poursuivant sa route et ne laissant derrière elle que le sentiment d’un rêve éveillé.
Enfance, Insouciance. .
L’heure est venue ma fille…
La voix de ma mère tremblait légèrement sous l’émotion.
N’oublie pas tout ce que tu as appris. Sois prudente et pense bien à utiliser ton nouveau nom à partir de ce jour.
J’opinais, les larmes aux yeux, prenant sur moi pour être aussi courageuse que possible.
Il… Tu es sûre qu’il n’y a pas une autre solution maman ? Il.. Il doit forcément il y en avoir une !
Elle me sourit… un sourire exprimant à la fois tendresse, affection, tristesse et appréhension.
Allons ma chérie, tu as 120 ans aujourd’hui. Tu es une adulte à présent. Et puis, ajouta-t-elle en me caressant la joue, tu sais bien que c’est la seule solution. Nous avons déjà eu du mal à les éviter ce dernier mois… Jamais ils n’abandonneront. Ils nous tueront jusqu’au dernier. Notre peuple peut prendre tout son temps pour ce qui est d’une vengeance, mais un jour où l’autre, elle doit s’achever. Et ce jour est arrivé.
Après une profonde inspiration, elle reprit.
Cela dit, n’oublie pas. La mort en soi n’est pas une fin, mais le passage vers un autre monde. l’Arvanaith est un lieu où nos esprits connaissent un bonheur sans fin. Alors, ne sois pas triste ma douce Elune.
Une dernière étreinte… un dernier sourire… et finalement l’heure de la séparation arriva. Je gardais les yeux rivés sur cette silhouette qui disparaissait peu à peu dans la nuit noire. Je sentais mon cœur se serrer dans ma poitrine et ne retins plus ce flot de larmes qui s’écoulait à présent sur mes joues. Puis doucement, je récitais cette prière si bien apprise et tant redoutée, même si je n’étais pas la mourante moi-même… du moins… pas tout à fait…
«Regarde vers le Couchant, je vois mes camarades, mes amours, mes amis d'enfance, ceux qui sont partis avant moi et ceux qui viendront me rejoindre. Je les vois à l'ombre des grands chênes, ou perchés sur leurs branches, le visage baigné de soleil... Ils m'appellent vers le Couchant, là où je vais. »
Je fermais les yeux, adressant une prière à la Dame des Songes. Je devais demeurer cachée là jusqu’à l’aube, tel était notre plan. Après cela, partir et entamer une nouvelle vie. Mais en attendant… oui en attendant je me laissais aller à la rêverie, revivant une fois encore tout ce qui nous avait mené en ce jour funeste.
Les elfes aiment voyager, découvrir des choses nouvelles. Toutefois, nous voyagions plus que le reste de nos semblables. Ce n’était pas tant pour goûter les splendeurs qui s’étendent ça et là dans les bois de d'Ethiel mais parce que nous n’avions pas le choix. Durant mon enfance, j’appréciais cette vie de nomade. Mes parents avaient pris soin de me présenter cela comme un jeu, une aventure. Ainsi je pus m’épanouir comme les autres elfes de mon âge, ou presque. Nous n’habitions pas au sein d’une communauté elfique, ou du moins, pas longtemps. Ainsi, nous demeurions tout au plus une décennie ou deux à un endroit, puis nous partions de nouveau vers de nouveaux horizons. Mes parents veillaient à mon éducation. Ma mère, qui répondait au doux nom d’Eowélia, était une magicienne. Elle mit un point d’honneur à m’inculquer des connaissances dignes de ce nom : sur notre peuple, nos dieux, mais aussi des connaissances d’ordre plus général. Et quand plus tard il s’avéra que j’avais le même don que mon père, elle tint tout de même à m’inculquer ce qu’elle considérait comme les bases de l’Art. Elle m’apprit même la langue de nos ancêtres que peu d' Elfes parlent encore si ce n'est pour quelques veilles incantations. Je dois avouer que même si au départ j’avais un peu de mal à me concentrer, cela semblait si important pour elle que je m’appliquais et étudiais consciencieusement. Nous savions que je n’aurai jamais l’étoffe d’une magicienne, mais je tenais à faire ce plaisir à ma mère. A côté de cela, mon père m’apprit le contrôle de mes émotions et la maîtrise de mon don. Il me guida vers des rivages où même ma mère ne pouvait nous suivre… des lieux où seuls ceux qui ont le don peuvent ne faire qu’un avec la magie… à leur manière. Cela dit, jamais je n’oublierai le jour où il me montra l’utilisation de sa boule de cristal, de notre boule de cristal. Elle était dans notre famille depuis des siècles et il me dit qu’un jour, elle serait à moi. Je m’imaginais alors commençant à avoir les premières rides de l’âge vénérable et recevant cette précieuse boule de cristal des mains de mon père… Je trouvais cela amusant et en même temps terriblement lointain. Puis je me raisonnais en me disant que cela demeurerait un très grand honneur de recevoir pareil splendeur. Mon père m’apprit que notre don se façonnait au fil du temps tel le reflet de nous même… Ainsi la nature de mes sorts, quelque part, dépendrait uniquement de moi. Je lui dis que je tenais à être digne du cadeau qu’il me ferait plus tard et donc devenir devin, comme lui et grand-père. Il me sourit… presque tristement… Pourtant il me guida vers ce chemin puisque telle était ma décision.
A cette époque, il y avait une chose qui me parut étrange… mais dont je ne compris la signification que bien plus tard. En effet, autant les elfes sont connus pour prendre leur temps dans tout ce qu’ils faisaient, autant mes parents semblaient vouloir condenser des siècles d’existence en quelques décennies… Cela se sentait non seulement dans leurs cours qui s’enchaînaient à une bonne cadence, mais aussi dans leur façon de se regarder, de me regarder. Je ne savais pas pourquoi, mais par moment j’avais l’impression que leur sourire était comme emprunt de tristesse… vision éphémère qu’ils se hâtaient de dissiper… Oui, cela me sembla d’une certaine incohérence avec ce qu’ils m’apprenaient par ailleurs sur les Tel’Quessir…
Tous nos déplacements apportèrent une certaine richesse en terme de rencontres faites de-ci, de-là. C’est ainsi, je fus également influencée par ces êtres à la vie si éphémère : les humains. Je les trouvais étonnants.. Leur façon de pensée… Le plus choquant fut quand nous sommes restés 15 ans à Giran. Cité des plus hétéroclites, j’y ai eu quelques amis humains… J’avais alors 60 ans, autrement dit j’étais toujours une enfant. Lorsque je connus mes compagnons de jeu, ils avaient entre 10 et 15 ans à peine… Ainsi je les vis grandir et « mûrir » jusqu’à leurs 25 ou 30 ans. Je les ai vu tomber amoureux, se marier, avoir des enfants… Tandis que moi, je ne dépassais même pas 1m10 de haut… Une enfant à leurs yeux. Ce passage n’est qu’un exemple, mais je n’arrivais pas à savoir à quoi m’en tenir avec les humains… Et pourtant, je dois admettre que nous avions connu quelques moments heureux ensemble et du coup, je crois qu’ils m’ont influencé à leur façon. Mais arriver à gérer cette différence de répercussion des ans sur un humain et sur un elfe me paraissait de plus en plus difficile. Heureusement, avec l’adolescence, mes parents, ainsi que quelques elfes plus âgés de notre connaissance d’alors, commencèrent ma préparation à l’âge adulte… à ma mort.
Le Nuage Lumineux nous apprend que la vie est une série de mystères dont Il dissimule les secrets. C’est ainsi que lorsque l’on m’apprit comment continuer à vivre heureuse durant les nombreuses années à venir sans succomber à l’ennui ou au chagrin, comment supporter le fait de voir les autres mourir et pourtant devoir continuer à vivre, mes parents me dévoilèrent le lourd secret qui pesait sur notre famille.
Si les naissances sont peu nombreuses chez les Tel’Quessir, celles de jumeaux semblent d’autant plus rares. Il y a environ 800 ans, ce miracle eut lieu et donna le jour à mon grand-père, Reuel, et son frère jumeau, Rentar. Leur naissance fut jour de liesse. Ils grandirent côte à côte, développant un lien particulier entre eux. Ils partageaient tout et devinrent inséparables. Notre peuple met l’accent sur la recherche du bonheur, et ils l’étaient… du moins jusqu’à ce que le destin leur joue un tour des plus cruels. Elle s’appelait Kessa. Ils firent sa connaissance au début de l’adolescence. Au fil des ans, elle passait de plus en plus de temps avec eux, et le duo devint un trio. Mais il fallut que l’amour s’immisce, se mêle et s’entremêle avec leurs liens d’amitié : ils tombèrent tous deux amoureux de la même elfe. Or, l’amour est un ballet qui ne se danse qu’à deux. Et Kessa choisit Rentar. Reuel aurait dû se réjouir pour eux, mais ce fut plus fort que lui, ainsi laissa-t-il la jalousie ronger son cœur et pervertir son âme. Cela tourna à l’obsession et il prit de plus en plus de recul vis à vis du jeune couple. Finalement arriva le jour du mariage, jour fatidique où débuta le cauchemar des Sierral un jour maudit. Reuel commit l’irréparable, l’impardonnable et interrompit la cérémonie en tuant Rentar. Un fratricide. Après cela, sa vie ne fut que fuite. Il s’était attiré les foudres de toute la communauté qui, comme le veut la tradition, commença à le pourchasser, lui et ses descendants, jusqu’à extermination complète. Deux siècles passèrent, deux siècles d’errance. C’est alors qu’il connut ma grand-mère, Merissa, et qu’il aima de nouveau. Un autre siècle passa et donna le jour à mon père, Thrandil. Et ainsi le cycle de la vie reprit son cours. Mais la vengeance est un plat qui se mange froid, surtout lorsque le temps ne pèse guère dans la balance.
Notre famille tentait de vivre des jours heureux, mais cette menace planait sans cesse au dessus de nos têtes. Nous repoussions l’échéance le plus possible grâce à notre inclination naturelle pour la divination. Mon grand père avait ce don, puis mon père, qui me le transmit à son tour. Un don du sang. Une bénédiction. Nous pouvions ainsi les localiser et prévoir à l’avance notre prochain départ pour maintenir une certaine distance entre eux et nous. Oui, nous connûmes des jours heureux. Mais je découvris alors que c’était eux qui étaient à l’origine du décès de mes grands parents quand j’avais une vingtaine d’années… et ils nous rattrapèrent une fois encore l’année de mes 93 ans. Cette fois-là, c’est mon père qui se sacrifia pour nous permettre à maman et moi de nous enfuir.
Pourquoi tiennent-ils tant à nous tuer les uns après les autres ? Même si mon grand-père n’avait pas à faire ce qu’il avait fait, pourquoi s’en sont-ils pris à mon père qui ne les connaissait même pas ? Et maintenant c’était au tour de ma mère et moi-même ? Après 8 siècles ! Non, je ne comprends pas… et cela, mêlé avec ma vie de nomade parmi d’autres races que la mienne, me fait me poser de nombreuses questions sur les Tel’Quessir… Comment peut-on être aussi cruel et rancunier ? J’en ai même éprouvé un certain… dégoût… pour eux… pour notre peuple… mais aussi, pour l’amour… Ce sentiment en apparence si innocent avait le pouvoir de détruire des vies entières…
Rester sur ses gardes, toujours prêt à partir. Partir, encore et toujours. Cela n’était plus un jeu… non. Qu’il me semblait loin le temps de l’insouciance de mon enfance…
Aujourd’hui était le jour de mes 120 ans, le jour du passage à l’âge adulte. Mais c’était aussi le jour de la fin des Sierral Ma mère voulait m’offrir une vie autre que celle d’une fuite éternelle. Aussi avait-elle décidé, le jour de la mort de mon père, que lorsque je serai adulte, elle ferait tout ce qui était en son pouvoir pour que nos ennemis nous croient mortes. Absolument tout.
C’est ainsi que je me retrouvais cachée dans ce tronc d’arbre, sortant de ma rêverie. J’entendais la forêt qui s’éveillait peu à peu, avant même que les premiers rayons du soleil n’apparaissent. Je retenais mon souffle. Quatre heures venaient de s’écouler. Il ne me restait plus qu’une heure à attendre pour savoir. Savoir si cela avait fonctionné. Savoir si… Je guettais les rayons du soleil comme une condamnée à mort. Puis quand vint le moment, je me glissais hors de ma cachette et balayais le ciel du regard. Un battement d’aile familier retentit non loin et Solad vint se poser sur mon épaule. Je lui caressais son pelage presque cérémonieusement. Après de longues minutes d’hésitation, je lui demandai d’aller voir… ce qu’il fit. Les minutes s’égrenèrent, derniers instants où l’espérance pouvait toujours s’ancrer tant bien que mal dans votre cœur. Puis finalement, le désespoir balaya tout sur son passage. Elle était morte. Ils étaient partis.
Aujourd’hui était le jour de mes 120 ans. Le jour du passage à l’âge adulte. Le jour de la mort d’Aeriyn Sierral. Le jour de ma mort.
Ma mère venait de mettre en place le subterfuge qu’elle préparait depuis des décennies maintenant. Son ultime illusion : notre mort.
Aujourd’hui était un nouveau jour. Celui de la naissance de Amrael, ma naissance.