Azurya
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 Recueil de Pages Déchirées

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Shuren
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MessageSujet: Recueil de Pages Déchirées   Recueil de Pages Déchirées Icon_minitimeSam 28 Fév - 14:01

Voici le BG complet de Shuren et Luxure, celui de l'ancien forum tout du moins, celui présent sur celui là c'est la Suite.
Avis aux gros lecteurs alors, je le poste pour le fun parce qu'il est très long.
PS : Je donne une armure à qui arrive à le lire au complet.


Chapitre I : L’Arrivée

Par une froide nuit sans étoiles, un navire traverse les flots, perforant la brume maritime de son étrave. Il était sombre telles les eaux des Mers du Nord sur lesquelles il voguait, difficile de distinguer où s’arrêtait la coque et où commençait la mer. Son ornement évoquait un galion d’une grande noblesse, quatre voiles d’un noir aussi lugubre que le reste du bâtiment. La figure de proue représentait une femme nue, les mains jointes sur sa poitrine. A son bord, trois silhouettes chaperonnées et vêtues d’une robe noire observaient l’horizon. Elles étaient prédominantes sur le pont avant, le reste du bateau étant étouffé par la brume.

Celle au centre s’avança soudain d’un léger pas, puis s’exclama : « Nous arrivons.»
Elle fit tomber la capuche de sa tête, dans un tel élan de grâce que l’on pu apercevoir des cheveux d’un blanc comparable à une rivière de diamant, tomber et ruisseler le long du dos de la jeune femme ainsi découverte. Elle était d’une beauté indescriptible, le teint bleuâtre, plus clair sur ses joues amoureuses, une frange bien dessinée et des yeux luminescents.
Elle se tourna vers les deux autres qui étaient présents derrière elle, un sourire narquois aux lèvres.

_ Alors ? Vous n’êtes pas impatients d’arriver, comme je le suis ?
Il n’y eu pas de réponse, que de brefs gestes corporels. Puis elle reprit, se tournant vers l’un d’entre eux.

_ Allons Shu ! Ne me dis pas que tu n’es pas ravi de voir notre voyage enfin se terminer ?
_ Oui … c’est une bonne chose, lui répondit son interlocuteur.
_ Umf ! Tu pourrais montrer plus d’entrain, grimaçant voyant sa réaction.

Pendant qu’elle retournait son visage vers le vent qui lui berçait le cou de sa fraîcheur, l’inconnu en question quitta lui aussi sa capuche pour découvrir son visage, les yeux bandés par un lourd tissu noir, ne laissant entrevoir que ses cheveux châtains, le bout de son nez et sa bouche impassible.

_ L’air semble si pur ici, ne le ressent tu pas Shu ?
_ Oui, le rivage de ces terres respire le bien-être de sa population, j’imagine.
_ Nous ne sommes guère loin des Terres Sombres pourtant, j’aurais pensée qu’ici au moins l’air aurait été différent. Les occupants doivent être de bien bonnes personnes pour ne dégager qu’une douce odeur de liberté.
_ En effet, la souffrance et l’agonie ne doivent exister sur ces terres semblerait il.
_ Hm… Nous nous chargerons alors d’y instaurer l’ordre dans ce cas.

La jeune femme s’avança vers l’homme, stoppa devant lui puis lui retira le bandage qu’il avait sur les yeux, puis scruta son visage, souriant.

_ Tu as un visage bien sage aujourd’hui Shuren.
_ C’est que l’émotion doit me faire perdre tous mes moyens, Dame Luxure, en ouvrant ses yeux d’un bleu intensément clair, tel un nuage d’étoiles voguant dans l’espace infini.


Dernière édition par Shuren le Sam 28 Fév - 14:14, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Recueil de Pages Déchirées   Recueil de Pages Déchirées Icon_minitimeSam 28 Fév - 14:04

Chapitre II : Prélude

A l’époque des Grands Royaumes, les guerres ne cessaient de se multiplier. Les troupes avançaient en conquérant chaque mois un peu plus de territoires. Mais l’un des plus sanglants de ces affrontements fut celui qui fit se rencontrer deux êtres que tout oppose, Luxure, l’ensorceleuse maléfique et Sir Shuren, le chevalier salvateur d’Einhasad. C’est dans la cité carrefour d’Ischpano que le combat pris place. Le royaume des Elfires comptait Luxure dans ses rangs, et celui de l’Arbre Blanc était dirigé par de multiples seigneurs suzerains, dont Sir Shuren faisait parti. Leurs conquêtes respectives les avaient amenées à prendre possession d’une cité commerciale et les deux royaumes ne pouvaient pas s’en partager l’occupation. Bien qu’Ischpano soit une ville libre, sans roi, ni suzerains, la destruction fut prononcée par les premiers cris de haine des troupes à l’instant même de l’attaque.

Les Elfires à pied coururent, épées, arcs et bâtons à la main brandissant l’offensive vers les troupes de L’Arbre Blanc. La riposte fut immédiate et les cavaliers de L’Arbre dévastèrent les premiers assaillants. Ainsi commença le désastre d’Ischpano, la ville fut vite le refuge des troupes restantes après plusieurs heures de combat effréné.

Les chevaliers de L’Arbre ne possédaient aucune magie, que leurs lourdes armures, de puissants arcs et des lames tranchantes. La cité leur servait alors de lieu de repli et de protection contre les magiciens, trop puissants face à leurs simples instruments en acier. Les troupes se faisaient minces, le reste des soldats demandaient aide et conseils au dernier seigneur encore debout, Sir Shuren. Son armure était criblée de flèches et son visage souillé par le sang. On pouvait lire sur son visage le désespoir de cette bataille, tellement d’hommes il avait perdu. Sa lame ébréchée, il se releva d’un instant de repos pour guider ses soldats vers la fin du conflit.

Il parcourait alors les murs de la Cité à la recherche de survivants ou d’ennemis non neutralisés. Il couru avec les quelques soldats qu’il pensait être les derniers encore en vie. Soudain, il tomba dans un espace découvert de la ville et vit alors les soldats Elfires qui les attendaient. Brandissant leurs arcs, les gardes de l’Arbre tirèrent leurs dernières flèches, mais furent vite abattus à leurs tours. Le seigneur se retrouva seul face aux quelques ennemis qui étaient resté debout. Après plusieurs échanges de lames, Shuren vit sa force baissée par la fatigue et l’épuisement. C’est après avoir vaincu celui qu’il pensait être son dernier ennemi que surgi de l’ombre des façades un soldat Elfire masqué. Il s’élança sur le seigneur, lame au corps pour l’abattre. Shuren répliqua en parant le coup de son épée. C’est alors que les deux armes explosèrent à l’impact violent, et les deux guerriers en furent projetés.

Epuisé par sa lourde armure et les flèches qui le rongeaient, Shuren resta adossé à un mur, incapable de bouger et de respirer bruyamment. De l’autre coté, dans l’ombre d’un mur, le soldat Elfire resta à terre, immobile. Shuren contemplait la scène, dans l’incapacité de se lever pour vérifier la santé de son agresseur. Puis, le corps au sol bougea, se tenant faiblement la main au sol et se retourna vers le seigneur immobile. Le masque que le soldat portait se disloqua, et un visage féminin apparu. Une femme à la peau d’un bleu terne ; des cheveux noirs ; elle portait une armure légère fissurée à plusieurs endroits. Elle était apparemment grièvement blessée, elle ne pouvait plus bouger d’avantage. Elle regarda intensément le seigneur dont le visage était très sombre et le regard affaibli, inquisiteur.

Après plusieurs minutes de silence, où nuls bruits dans la cité ne pouvaient évoquer qu’il y avait d’autres survivants, l’elfe qui gisait au sol pris la parole :
_ Vous êtes Seigneur, n’est ce pas ?
_ Oui … j’ai dirigé l’attaque contre vous si c’est ce que vous voulez savoir.
_ Hm … V…Vous croyez pouvoir en finir avec cet affrontement rapidement ?
_ Le temps qu’Einhasad me redonne des forces.
_ Vous p…pensez vous levez et m’achever ?
_ Hum !

Shuren fut très surpris par cette remarque, et resta dans le silence. Il ne vénérait pas les guerres, il ne jugeait pas nécessaire les morts inutiles. Il observa au sol la femme avant l’adversaire, la regarda dans les yeux, se sentit toucher par la douleur qui les rongeaient tous les deux. Il desserra son poing et dit d’une voix calme « Non, je ne vous tuerai pas ».

Le visage de l’elfe s’éclairci alors et elle se sentit soulager par la réponse du chevalier. Des larmes coulèrent sur ses joues et un calme régna dans la cité dévastée. L’elfe se dressa légèrement du sol, comme pour remercier le chevalier de sa clémence. Elle se tenu sur une main et dressa l’autre dans la direction de Shuren, comme pour être gré de lui avoir laissé la vie sauve. C’est alors que de son coté, Shuren souriait à son tour, étant soulagé de la fin de ce conflit, il leva alors son regard et le fixa soudainement.

L’elfe fut dérouté par l’expression de son locuteur, mais sa vision plongeait plus haut que sa propre présence. Elle se retourna alors pour observer la source de ce trouble et fut effrayer d’apercevoir un bref instant une ombre surgir du mur derrière elle. Cette silhouette armée d’un sceptre trancha le corps de la guerrière au sol. Le sang coula alors sur les dalles qui pavaient le sol, des bouts de chair se répandirent en offrant un spectacle d’une horreur affreuse. La boucherie ainsi exposée fut terrifiante pour le seigneur Shuren qui, traumatisé par l’atrocité de la scène, essaya de prendre la fuite, du mur où il était adossé, en grimpant d’une courte distance, se levant un tantinet. L’inconnu ainsi découvert laissait apparaître son bras emmitouflé tenant l’arme du crime, des bottines dépassaient de sa cape sombre et piétinaient le sang de l’elfe qu’il avait démembré. Il retira le tissu qui recouvra son visage, arrachant des lambeaux de vêtements qui découvrirent un visage bleuâtre, une chevelure blanche et un regard assassin. Ce geste fit apparaître la posture féminine de l’individu, une poitrine bien haute, des épaules basses, une taille creusée et des jambes longues et fines.

Une pénombre envahit la cité, la visibilité se voila. Le crépuscule plongea les ruines dans de profondes ténèbres où le ciel avait une couleur rouge sombre. La place offrait une scène macabre avec le sang qui jonchait le sol, des restes elfiques sur les dalles et un silence entre le seigneur blessé et la guerrière indomptable. Elle écrasa la pointe de sa botte comme pour remuer la chair en marmonnant « Traîtresse !». Shuren, n’ayant plus la force de rester debout, retomba violement sur le sol, faisant sonner son armure lourde et décrépite.

_ Elle méritait de mourir, ne t’en fais pas pour sa vie.
Shuren ne prononçait pas un mot, il resta dans son silence, à baisser le regard.

_ Cela fait un moment que je vous observe, vous passiez un bon moment ?
Il tourna légèrement la tête vers la gauche, comme pour éviter de la voir.

_ Il ne restait plus grand monde, vous aviez raison de penser que vous n’étiez que les deux seuls survivants.
Il continua à la tourner un peu plus.

_ Est ce une raison pour ne pas continuer ce pour quoi nous nous battions ?
Encore un peu plus.

L’elfe s’élança, et lui écrasa le torse de sa botte sur le mur. Shuren serra les dents, échappa un cri de douleur, et cracha un peu de sang.

_ M’écoutes tu quand je te parle ? La moindre des politesses serait de me regarder et de répondre à mes questions.

Shuren resta dans un profond silence, sous le jouc douloureux de sa nouvelle assaillante. Il laissa échapper ses dernières forces dans un ultime et profond souffle, comme pour inciter son agresseur à lever la sentence qui planait sur sa vie. En élargissant les épaules, la svelte et jeune elfe prononça ces mots en ricanant : « Quel est ton nom, ô seigneur de l’Arbre Blanc ». Bien qu’épuisé et au gouffre de la mort, le seigneur en sang répondit calmement :

_ Shuren…
_ Simplement Shuren, c’est un nom un peu pauvre pour la race qui est tienne.
_ Fils d’Hélior et de Malnaria, successeur au trône d’Isternia, seigneur Shuren D. Styffer.
_Styffer … ce nom ne m’est pas inconnu.
_Et quel est donc le nom que je dois donner à la personne qui tient ma vie entre ses mains ?
_ Luxure, simplement Luxure. Souriante.
_Que comptes tu faire de moi ?
_Te rendre docile dans un premier temps, ton arrogance m’est insupportable.
_Me rendre … tu … tu prévois de me laisser en vie ?
_Arrêtes de prendre cet air stupéfait, ta vie m’appartient désormais, et l’idée d’avoir un esclave m’attire au plus haut point.
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MessageSujet: Re: Recueil de Pages Déchirées   Recueil de Pages Déchirées Icon_minitimeSam 28 Fév - 14:06

Jour : Inconnu. Mois : Inconnu. Année : Inconnue.
Journal déchu MV56-H Page 347.
« Dans les ténèbres je gis, dans le silence je sombre.
Le temps n’est plus une donnée, je ne me souviens plus de mon âge, depuis combien de temps suis-je ici. Je ne sais même plus si Einhasad se soucie de moi, je doute, mon esprit s’estompe par la noirceur des murs … »


Chapitre III : Pénombre

L’agitation qui régnait dans les douves traduisait rarement d’un tel effort et d’un tel soulagement. Cependant, l’activité qui y était pratiquée ne se montrait pas commune. En ouvrant les lourdes portes en bois du cachot, la jeune elfe pénétra délicatement dans la salle en descendant les marches dans un pur élan de grâce. Elle portait une robe d’un bleu légèrement sombre, d’un haut soigneusement serré sur sa poitrine et de hauts talons tout juste séduisants pour ne pas être un calvaire à descendre des escaliers.

Plus bas, derrière les chaines et les bracelets de fer, de bruyants coups étaient portés dans le vide. Le sifflement des lames dans les airs résonnait sur les murs. L’humain faisait danser une paire d’épée de part et d’autre, dans un danse dont lui seul connaissait les enchainements. Parades, coups horizontaux et verticaux, gardes et attaques s’harmonièrent dans une composition de mouvements plus mélodieux les uns que les autres. Les bruits de pas s’intensifièrent à leur tour, pour enfin s’interrompre brusquement sur le sol de la salle. La femme s’assit sur la dernière marche, et adopta une posture intéressée.

_ Toujours à t’entrainer ? dit la voix douce et claire, éclairée par une simple bougie.

L’épéiste stoppa calmement son geste, abaissa son bras, puis tourna la tête vers la ravissante créature assise un peu plus loin. Il transpirait, il suffoquait ; reprenant son souffle, il adressa un simple regard fatigué à son interlocuteur. Après avoir déposé l’une de ses épées, il passa une main sur son visage, et soupira un long moment. La jeune femme canta la tête, en le regardant avec un sourire. L’homme s’assit pour finir, toujours en essayant un peu trop rapidement de reprendre son souffle. Gardant sa lame à la main, il adressa un signe de tête à l’elfe.

_ Qu’est ce que tu fais ici ? Qu’est ce que tu me veux ? dit-il.
_ Oula ! Ne sois pas si agressif Shuren, je suis venu par pure courtoisie, pour que tu te sentes moi seul dans ce trou à rats.
_ Je suis seul ici dans ce trou à rats parce que tu m’y as enfermé, Luxure.
_ C’est comme ça que tu me remercie ? Esquissant une moue.

Luxure se leva avec toute la séduction dont elle pouvait faire preuve pour attiser un quelconque désir. Dans la surprise, Shuren se leva également et serra le manche de son épée. Son jeune visage impétueux s’efforçait de ne dégager aucune émotion, aucun signe de faiblesse. L’elfe se rapprochait toujours de l’humain jusqu’à arriver très proche de lui. Elle courba une de ses hanches, en trouvant appuie sur la pointe des pieds. Ramenant ses mains sur sa poitrine, elle mimait aussi bien les émotions qu’elle voulait transmettre que l’on pouvait facilement se faire prendre au jeu de l’hypnose.

_ Tu ne m’aimes pas, Shuren ?
_ Comment éprouver une sympathie pour la personne qui me tiens en chaînes ?
_ Mais … je ne vois pas de chaînes à ton poignet.
_ C’est comme si, je suis enfermé ici sans pouvoir sortir.
_ C’est pour que tu puisses mieux profiter des moments où tu seras dehors.
_ J’ne suis pas ton chien, ça ne sert à rien de me garder ici.
_ Bien sûr que si, tu es déjà plus docile.
_ Je ne suis pas plus docile qu’à notre première rencontre, je te tuerais si j’en avais l’occasion.
_ Hm… tu tiens pourtant une arme …

Shuren s’arrêta un moment en desserra le manche de la lame apparemment un peu plus lourde.

_ Pourquoi tu n’en profites pas maintenant, Shuren ?
L’homme ne répondit pas, et baissa la tête, laissant finalement tombé l’épée au sol.

_ Tu manques de courage ? Tu manques de détermination ?
_ Je … je ne veux pas mourir …
_ C’est parce que si tu me touches, les autres te tomberont dessus que tu dis cela ? Quel sort te réserve t-il s’ils n’ont pas de mes nouvelles en remontant de ta fosse ? Peut-être un pire que la mort …

Shuren tomba au sol, légèrement tremblotant, il essaya de ne pas confondre ses idées et s’efforça de recentrer son esprit. C’est alors que Luxure plia les genoux et se pencha sur lui. Elle le bouscula brusquement en arrière et s’allongea sur son torse, posant une main sur son visage.

_ Tu as peur ? dit-elle d’un ton timide mais trompeur et manipulateur.

Shuren resta à nouveau silencieux, en gardant un visage neutre et un regard vitreux. Il resta stoïque dans cette position forte indécente.

_ A quoi cela te sert il de t’entrainer sans arrêt dans la pénombre de ce cachot ? Tu sais que cela me fait du mal de te voir suer pour une besogne si inutile. Alors que tu serais si mieux dans ma chambre à me servir et à me divertir.

Elle posa un baiser dans le creux de son cou, poussant un léger gémissement. De sa main, elle caressa son torse en insistant sur les formes prononcées.

Le temps s’arrêta.
L’espace d’un instant, il n’y avait plus de souffrance, plus de prison, plus de séquestration.
Bien qu’il sache que Luxure était douée de perfidie, Shuren se laissa aller à un plaisir incertain, primaire, absent. Il décontracta la pression de ses muscles.

_ Einhasad ne me voit pas dans ce gouffre où la lumière ne peut entrer.

L’elfe leva la tête, arrêtant sa main sur le bas du ventre de l’humain ; lui, restait impassible, regardant la voute sombre et noire du cachot, il était affaiblit, fébrile. Dans un instinct des plus naturelles, leurs regards s’échangèrent dans le silence du cachot. Elle s’avança vers ses lèvres alors qu’il leva la tête. Elle les lui mordilla de ses canines pointues.

« … le vide … je suis …perdu … »
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MessageSujet: Re: Recueil de Pages Déchirées   Recueil de Pages Déchirées Icon_minitimeSam 28 Fév - 14:07

Jour : Inconnu. Mois : Inconnu. Année : Inconnue.
Journal déchu MV56-H Page 365.
« Quelle est cette sensation ? J’ai froid.
Comment puis-je vivre encore ? Je suis seul ici.
Comment puis-je continuer ainsi alors que … je l’ai senti …

Le souffle.
L'intensité de mon souffle ...
La rage de nos corps, cette ardeur charnelle.

La chaleur.
La chaleur de sa peau ...
Transpirante. »



Chapitre IV : La sortie des Bas-fonds, la noirceur de monde extérieur.

Le réveil fut difficile. Comme depuis les dernières nuits, il ne dormait plus.

Shuren avait arrêté de s'entrainer. Ses lames, posées un peu plus loin, faisaient maintenant partie du décor du cachot.
Allongé sur le sol humide, il restait là, sans s'efforcer, scrutant les parois, les embrassures, et la grande porte en bois tout en haut des escaliers. Il attendait, tous les jours, la venue céleste d’un Ange, d’une apparition, d’un signe, d’une réponse.

Il était tellement resté ici, sans bouger dans le noir absolue que ses yeux étaient devenus d’un gris terne et métallique. La moindre once de Lumière suffirait à lui bruler les pupilles. Il se fondait tel un caméléon dans l’obscurité de la pièce, on ne pouvait plus voir dans la pénombre que deux petits points brillants.

Dans un grincement strident, la grande porte de bois s’ouvrit alors. Une ombre se posta sur le seuil de celle-ci, et une voix cristalline prononça, sans discorde dans le ton : « Suis-moi. »

Le quasi-nyctalope dressa un bras pour se protéger les yeux devant la lumière aveuglante que laissait jaillir l’ouverture béante ; il se leva péniblement et s’avança vers les escaliers. Plus il montait, plus il serrait les dents de douleur. Les yeux complètement fermés, il s’appuya sur le mur pour s’aider à avancer.

Arrivé à quelques pas de la sortie, il s’arrêta, se tordant de douleur.
L’ombre descendit quelques marches, et l’on découvrit la splendeur d’une femme, aux formes généreuses, aux cheveux blancs, et à la peau bleue. Elle entoura la tête de Shuren d’un bandage en tissu épais.

_ C’est toi Luxure ? dit-il de la plus innocente des voix.
_ Dépêches toi.

Elle le hissa hors du palier, et le tira encore tout le long d’un couloir.
Elle portait une robe rouge aux couleurs mates, cousue de fils d’or avec une descente noire. Shuren, lui, était vêtu d’un pantalon court et d’un haut déchiré, rattachant et assemblant plusieurs morceaux de cuir et de drap souple, ficelés par une corde tressée.
Perdu dans un monde aveugle, l’humain levait la tête pour essayer de percevoir un quelconque indice de sa situation actuelle. Où était-il, et que faisait-il ici ?

La course s’arrêta à ciel découvert, Shuren le sentait. Il frotta du pied pour s’apercevoir que le sol était fait de sable, de microscopiques gravillons. La femme lui lâcha la main, et il se sentit comme perdu dans un énorme espace d’incertitudes. Il arborait ses mains devant lui pour maintenir un équilibre, mais une voix arrêta sa confusion.

_ Prends ça, tu va en avoir besoin. Un bruit de chute se fit entendre
_ Où… où suis-je ?
_ Lil sargtlin elggar. Dit une voix.
_ Uss jaluk elar. En dit une autre.
_ Mais … qu’es ce qu…
_ Bats toi Shuren. Répéta la première voix.

C’était la voix de Luxure qu’il reconnu, il se pencha et parcouru le sol de ses mains. Il chercha en direction du bruit qu’il avait entendu. Mais avant qu’il n’ait eu le temps de trouver quoique ce soit, des fracas de pas résonnèrent sur le sol, des pas qui venaient dans sa direction, des pas lourds, d’une cadence déterminée.

Shuren commençait à perdre ses repères, il tenta de retirer son bandage, mais après quelques centimètres seulement, il hurla de douleur, croyant devenu purement et simplement aveugle à toutes couleurs. Il écrasa son visage de sa main, et de l’autre jonchait le sol à la recherche d’un objet. Il attrapa un manche. Après avoir tripoté l’objet un peu plus, il s’aperçu qu’il s’agissait d’un glaive, dont la lame était sèchement aiguisée.

Il la prit fermement dans la main droite, et tâta le pommeau avec patience, tout en se concentrant sur son adversaire qui n’arrêtait pas d’avancer.

Soudain, un silence, un souffle profond. Shuren bascula violement sur la gauche pour éviter le coup qui atterrît finalement dans le sable, là où il trouvait précédemment. Il tourna d’un demi-tour en gardant appui sur son pied gauche, et leva son glaive, pointé vers son ennemi.

Encore une fois, un silence, avant d’entendre un cri d’effort. Reculant vivement, Shuren évita encore la salve à l’aveuglette, dérapa sur un mètre et replia son arme sur le flan de son bras droit. Il comprit bien vite qu’il ne continuerait pas encore à avoir autant de chance, la prochaine attaque pourrait lui être fatale. Il enjamba un pied, puis l’autre, couru vers sa cible, dégageant son bras armé. Il posa un premier pied d’appui, le gauche, puis ramena l’autre derrière celui-ci. Shuren protégea son avancée fulgurante en plaçant le glaive sur le revers de son bras. Se baissant pour éviter l’attaque frontale qui lui arrivait de plein fouet, il posa sa main libre au sol derrière lui et pivota sur celle-ci, se retrouvant dans le dos de son adversaire. Il bondit, prenant appui sur l’épaule de l’autre, grimpa ses jambes et se retrouvât la tête en bas. Un mouvement de bras circulaire, et s’en était fini.

Il retomba du mieux possible sur le sable, mais dérapât légèrement, terminant au sol, presque allongé.

Un long silence, puis un premier écho, un objet en chute, puis un plus lourde.
Shuren se releva, et se tenu droit, fièrement.

« Bwael, suis moi. »

Il jeta le glaive et s’avança vers la voix, en gardant le visage bien droit, les épaules écartées.
Il monta tout une tour en suivant Luxure dans ce qui semblait être un château aux pierres froides et grisonnantes. Elle l’amena dans une chambre, dont elle ferma la porte dès qu’il fut entré.

_ Tu t’es bien débrouiller, je suis contente.
_ Que veux tu dire, c’était ton épreuve, c’était ton idée ? Grognant.
_ Shuren, c’est fini … ne te mets pas en colère.
_ J’ai failli y laisser ma vie, tu comprends !? Et je suis presque aveugle après cette éternité passé dans ce trou noir !
_ Tu n’auras plus à le supporter, tu va vivre ici, avec moi à partir d’aujourd’hui …

Soudainement, la sombre changea de ton, et les mots qui sortirent de sa bouche étaient graves et saccadés, agressifs et bruyants.

*sombre* « < Mais ton parcours ne s’arrête pas là, le plus dur reste à faire.> »

Shuren tourna la tête vers elle, et grimaça à entendre ce charabia, il soufflait déjà des yeux, ses oreilles aillaient être mises à rude épreuve.

_ Quoi ? Luxure, je ne comprends pas, que me dis-tu ? D’un ton renfrogné.
_ <Il n’y a pas d’autre choix, je ne puis te garder ici si tu ne te soumets pas un minimum, ce n’est pas tant.> Haussant la voix.
_ Luxure …
_ <Ce ne sera pas un calvaire, tu serras inondé et sans t’en rendre compte, tu me comprendras bien vite.>

Shuren tomba sur une chaise, épuisé, désemparé, il ne savait plus quoi faire. Parler à quelqu’un était son seul échange avec le monde extérieur, alors s’il ne comprenait même plus la langue, c’est toute sa douleur qui remontait au fond de son cœur.

_ Luxure, je ne le supporte pas … dis moi quelque chose. D’une voix inquiétée.
_ Tu va apprendre notre langue, Shuren, et ce n’est pas une demande.

Un grand silence retentit.

_ Je ne comprends pas … pourquoi moi ? Pourquoi tout ça ? Pourquoi maintenant ?
_ Je t’ai choisis Shuren, je t’ai choisis pour être à mes cotés.
_ Qu’ai-je de si spécial ? Est-ce que je suis robuste ? Est-ce que je suis manipulable ? Plus confiant.
_ Tu es destiné à faire de grandes choses Shuren, depuis ta naissance, ton apprentissage se poursuit, et il passe par là.
_ … *surpris* Il…il passe par toi, … il passe par ces années passées dans un cachot ?
_ Les gens heureux toute leur vie ne deviennent jamais de grandes personnes, ils subissent ce qui leur arrive, toi, tu es fais pour autre chose.
_ Et moi, je suis fais pour être à tes cotés, je suis fais pour partager ta couche ?
_ Chaque chose en son temps Shuren, ne soyons pas impatient *amusée* <Tu va te faire à ta nouvelle vie plus tôt que tu ne le crois, fais moi confiance.>

Elle posa une main sur son épaule, et hocha simplement la tête.
Après un long souffle d’incertitude, un accent grave et enroué se fit entendre dans les mots de l’humain : « …hu …ba …ba …bwael. »

« La passion.
La passion de sa voix …
Résonnant amèrement dans mes oreilles. »
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MessageSujet: Re: Recueil de Pages Déchirées   Recueil de Pages Déchirées Icon_minitimeSam 28 Fév - 14:08

Jour : Inconnu. Mois : Inconnu. Année : Inconnue.
Journal déchu MV56-H Page 479.
« Avec elle, je partage mes journées, plus rien n’a vraiment d’importance.
Je vis, c’est suffisant.
C’est aussi la raison pour laquelle je ne m’abandonne pas.
Si je lui cède un temps soit peu, c’est que je serais déjà mort. »


Chapitre V : Le Départ

La pluie tombait déjà depuis plusieurs heures sur le château aux pierres glaciales. Chaque goutte d’eau émettait le bruit unique d’un choc cristallin et mélodieux. Se répétant à l’infini, la symphonie gagnait les chambres comme si elles en étaient imprégnées. Les bruits de pas dans les escaliers étaient la seule chose qui venaient se mêler aux percutions aqueuses.

Un être capuchonnait montait les marches de la Tour Est. Il avançait à une allure calme et reposée, morne. Il continua sa course dans un couloir tapissé de draps violets. Chacun de ses pas écrasait le tapis qui était d’une teinte rougeâtre, délavée. Il s’arrêta finalement devant une porte en bois couleur acajou. Poussant la porte, l’être s’engouffra dans la pièce, puis referma derrière lui avec délicatesse.

La chambre avait tout d’un luxurieux endroit, le lit en baldaquin prédominait l’espace. Une cheminée fournissait à la pièce la douce chaleur appréciée des longs mois d’automne. Quelques portraits et peintures décoraient les murs pour offrir à l’air ancien de la chambre tout son charme et son volupté. Finalement, après quelques secondes de silence, une masse s’éleva du lit, faisant glisser les draps qu’on aurait dit de soie qui la couvrait.

Une rivière de cheveux blancs sortit de dessous les tissus brodés. La forme se secoua langoureusement et, derrière la chevelure abondante, l’on pouvait percevoir le visage chaleureux d’une sombre aux yeux en amandes qui se cachait timidement à l’abri de quelques mèches. Elle se dressa doucement sur ses bras, toujours un peu recouverte par le drap du lit. Puis elle donna un vif coup de tête sur le côté et fit valser ses cheveux qui suivirent le mouvement en allant se loger sur son cou, le long de son épaule. Elle hocha doucement la tête vers la capuchonné et dit d’une voix douce : « Tu es venu me réveiller, Shuren ? »

L’homme au seuil de la porte retira son chaperon, découvrant le jeune visage d’un humain au teint clair et écarlate, les cheveux châtains et ternes, les yeux bandés par un tissu sombre et délavé. Il acquiesça et resta impassible.

_ Tu sais que tu es trop mignon. Vraiment, j’apprécie que tu viennes me dorloter.
_ Il pleut aujourd’hui, c’est un temps à rester couché.
_ Viens donc te coucher avec moi, et retire moi ce bandeau, tes yeux me manquent. Et tu n’es pas aveugle tu sais, la lumière du jour ne va pas te les brûler.
_ Je préfère encore le garder.
_ Ooooh c’est trognon. On s’est attaché à son petit bout de torchon ? Enfin bref, il est peut-être temps que je me prépare.
_ Que faisons-nous aujourd’hui ? Des cours de langues ?
_ Ooh mon petit Shuren ! Mais c’est que tu m’excite en disant cela.
_ Je voulais dire des cours d’apprentissage de la langue sombre.
_ Nau, nau pas aujourd’hui, j’n’ai pas la tête à ça. Et puis je me demande si tu en as encore besoin maintenant, tu la maîtrise complètement.

Shuren recula d’un pas et fronça les sourcils. Luxure sourit dans son lit et serra contre sa poitrine les draps de velours qui lui servaient de couverture. Elle laissa glisser ses jambes sur le bord du lit, en prenant soin de les mettre à nue. Puis elle se leva avec grâce et s’avança vers Shuren, toujours vêtue de ses longs draps qui faisant maintenant plus penser à une traine. Elle se dressa sur ses doigts de pieds et se pencha sur le torse de l’homme, levant la tête pour croiser son regard.

_ Aujourd’hui est un jour spécial, parce que c’est le jour où nous partons d’ici.
_ Comment ?! Nous … nous …
_ Siyo, tu as bien entendu, je pars en voyage, et je t’amène avec moi.
_ Mais où allons nous ? Et comment ? Et pourquoi ?
_ Parce que nous n’avons plus rien à faire ici. Nous partons ce soir en bateau avec Ezekiel.
_ Ezekiel … mais qu’est ce qu’il …
_ Je ne me sépare pas de lui, c’est tout.
_ Et depuis quand est ce programmé ?
_ Depuis que je t’ai gardé ici, c’est pourquoi tu es là, pourquoi je suis là, pourquoi nous sommes fais. Allons, je t’ai déjà parlé de ça.
_ Oui … mais je ne m’attendais pas à ce que ce soit …
_ A ce que ce soit vrai, je ne t’ai jamais mentis pourtant. Bwael, laisse moi me changer et va m’attendre dans la salle à manger.
_ Ou allons nous ?

Luxure se retourna. L’on pouvait voir son dos en entier et le haut de ses fesses, toisé par le drap qui cachait le reste de ses parties intimes. Elle s’avança vers la fenêtre et toucha le verre d’une main souple et délicate. Puis dit sans se retourner : « Azurya ».
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Shuren
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MessageSujet: Re: Recueil de Pages Déchirées   Recueil de Pages Déchirées Icon_minitimeSam 28 Fév - 14:13

Dernier Chapitre : La Malédiction des Amants

Shuren pressait le pas dans le couloir central. Toujours avec son tissu sur les yeux, il effleurait du bout des doigts les murs à chaque changement de direction. Il allait tellement vite que, soit il pouvait belle et bien voir même à travers son bandage, soit il connaissait par cœur le château et ses recoins. Shuren ouvrait les portes avec empressement et violence, comme s’il n’allait plus avoir à les refermer. Il arriva enfin à celle de la salle à manger. Il s’appuya de tout son poids dessus, et poussa à bout de bras les deux lourds volets.

L’ouverture fit entrer un épais rayon de lumière dans la pièce. Après quelques instants d’incertitude, l’homme referma les deux battants derrière lui. La salle à manger, à l’instar de la chambre, était tout aussi bien décorée, des portraits de personnages hautement costumés, des blasons, des armoiries, des emblèmes parsemaient les murs. La pièce s’étendait en longueur, tout comme la table de plus de trente mètres de long qui était installée au milieu, sur laquelle étaient rependues des chandeliers allumés, dont la cire dégoulinait depuis bien longtemps.

En bout de table se dessinait une silhouette. On arrivait à voir assez distinctement malgré la pénombre de la pièce une sombre à la chevelure incolore et éclatante dans une robe de soie blanche, brodée de fils d’or. Elle était de dos et l’on percevait le nu de l’arrière de son buste, jusqu’à la chute de ses hanches. Elle avait une main posée sur la table, appuyant sur une robe de voyage. Shuren s’avança vers elle, mais elle stoppa sa course de sa voix.

_ Ezekiel m’a passé ceci.
_ Qu’est ce que c’est ? repliqua Shuren en penchant alors la tête sur le coté.

Elle tira la robe pour découvrir un livre à la couverture sombre, à la reliure ébréchée et dont les bordures étaient usées. Luxure en caressa la surface du bout des doigts.

_ Qu’est ce que c’est ? Je ne vois pas. répéta Shuren.
_ Cela va nous aider pour la suite de notre voyage. dit Luxure d’une voix sobre.
_ Luxure … de quoi avez-vous discutez avec Ezek…

Il s’arrêta en sentant Luxure se tourner vers lui. Elle fit glisser le livre vers le bord de la table, le pris dans une main, puis elle se mit à feuilleter vivement les pages de l’autre. Soudain, elle s’interrompit et pointa du doigt un paragraphe, les yeux eux aussi rivés dessus. Du bout de son index, elle vacilla entre les lignes en lecture rapide, puis elle leva lentement la tête et dit :

« Verin del ssinssen »

Shuren tourna légèrement la tête sur le coté pour tendre l’oreille. Il essayait de comprendre, et répéta les mots dans son esprit pour en trouver la traduction. Mais il renonça quelques millièmes de secondes après, quand il vit une intense lumière apparaitre. Il pouvait la voir même à travers son bandage sur les yeux.

Luxure avait la main collée contre la page qu’elle avait lu, puis la leva délicatement du faisceau lumineux. Entre sa paume et le livre flottait un fil éthéré, brillant comme un millier de lucioles. Elle le déroula comme un fouet et lança à Shuren un regard froid, glacial, comme si la Fin était au menu. Shuren ne savait que faire, il restait debout sans bouger, déconcerté. Enfin, dans une ultime réaction, lente et incertaine, il prit le haut de son bandage et le descendit pour découvrir son œil gauche.

L’ensorceleuse ramena sa main contre son bustier. Désormais le lien joignait la poitrine de Luxure au livre. Elle scruta à nouveau quelques lignes puis releva la tête vers Shuren. Ce dernier ouvra finalement son œil pour observer la scène. Un flot d’énergie s’échappait du livre, et une lumière éblouissante restait coller à la main de Luxure. Shuren resta immobilisé devant ce spectacle à la fois époustouflant et inquiétant.

Elle leva les yeux vers lui et leur regard se croisèrent.

_ Shuren, est ce que tu m’aimes ? dit-elle avec un brin de tristesse dans la voix.
_ Qu..QUOI !?

Sans attendre de réponse, Luxure ferma les yeux et s’écria : « Plu’uss ! »
Un halo de lumière s’éleva autour de sa main et rétrécit jusqu’à se compresser dans un vif bruit strident. Le fil éthéré implosa, comme se libérant de sa force et formait maintenant des maillons de lumière bleue, construisant une chaine entre le buste de Luxure et le manuscrit. Lorsqu’elle retira sa main, le dernier maillon était comme encré dans sa peau, à l’endroit de son cœur.

Elle regarda Shuren sur un air de défi, et s’écria : « Do'bauth ! »
Elle passa avec rapidité la main sur les pages du livre et en ressortit, comme un tour de cartes, une pointe qui terminait alors le bout de la chaine. Elle bloqua sa respiration, arma son bras, et sans plus attendre lança le pieu vers Shuren. La chaine se déployait de sa poitrine jusqu’à vers Shuren ; bientôt, il l’atteignit en plein cœur.

Shuren fut heurté, paralysé par le choc de la pointe sur sa poitrine, pliant un genou à terre, il s’effondra et plaqua une main sur le sol. La douleur était insupportable. Même s’il ne voyait pas de sang, il ressentait une forte pression à l’intérieur de son torse. Il amena sa main libre contre la partie touchée, et essaya de trouver une explication à son mal. Il n’arriva à toucher d’un anneau, un maillon de la chaîne incrustée à même sa peau transpirante. En sueur, il se croyait mourir. Il resta un moment à scruter le vide devant lui, pointant son regard sur les dalles de la salle à manger. Puis, dans un dernier appel à l’aide, il leva la tête vers Luxure et écarquilla les yeux.

Elle était à terre, comme lui, crispée d’une douleur à la poitrine. Le livre était tombé à ses cotés, et ne dégageait plus aucune lumière. Elle remua et leva la tête à son tour mais ne regardait pas Shuren, elle s’appuya sur ses jambes, et se redressa.

Elle expira en suffoquant. Respirant profondément, elle calmait sa tension. Ella lança à Shuren un dernier regard, qui semblait signifier une brève empathie. De son coté, lui était perdu, sans savoir quoi penser, toujours un œil sur la chaine lumineuse qui reliait alors leur deux corps. Shuren ouvra la bouche et n’eut même pas le temps de prononcer un « Qu’est ce que c’est que ça ? » que Luxure engagea :

_ C’est un sortilège d’emprisonnement.
_ Oui... oui oui … mais, comment l’as-tu appelé ?
_ « Verin del ssinssen »

Shuren, essoufflé, tenta de traduire la phrase qu’il reconnut comme l’intitulé du sortilège.

_ La… la Malédiction …
_ La Malédiction des Amants.
_ Qu’est ce que ça veut dire ? Quels en sont les effets ? Il regarda la chaîne avec colère.
_ Nos cœurs …, murmura Luxure, hésitante. Nos cœurs sont reliés. Nos vies le sont aussi. Désormais, nous serons toujours ensemble Shuren.
_ Je… je ne comprends rien. Comment ça, nos cœurs sont reliés ?
_ Ils font plus qu’un, nous partageons le même cœur, celui de notre amour, et celui qui périt fait périr l’autre.

Shuren s’arrêta net de stupeur, il empoigna la chaine qui émit un petit bruit de métal.

_ C’est … c’est impensable, comment as-tu pu ?
_ C’était la seule chance de t’avoir toujours près de moi, c’est une assurance.
_ Tu es folle !
_ Je prends des précautions, tu ne seras plus enfermé ici, je ne pouvais pas prévoir ce que tu allais faire ensuite. Heureusement que tu m’aimes.
_ Je ne t’aime pas !
_ Si. Sinon le sortilège n’aurait pas fonctionné, pourquoi crois tu qu’on l’appelle la Malédiction des Amants.
_ Perverse. Il serrait ses poings jusqu’au sang.
_ Bwael, prends tes derniers affaires, nous partons au Crépuscule, dit elle d’un ton détaché.

Les maillons de la chaine s’envolèrent peu à peu, comme en s’effritant. Shuren remua les doigts, puis laissa tomber sa main sur le sol. Luxure tourna les talons, certains des anneaux se brisèrent, laissant disparaitre avec eux de minuscules éclats de lumière bleue. Elle sortit de la salle par la porte du fond. Des larmes tombèrent de son visage au seuil de la porte. Lui resta par terre, et tapa lourdement le sol d’un coup sec et violent. Il serrait les dents, entre rage et amertume, il versa à son tour des larmes de haine.

C’est alors qu’il leva innocemment le regard et vit, à quelques millimètres de là, un de ses cheveux perdre tout éclat brun. Il le vit moisir, se transforme en un cheveu terne et presque mort, le cheveu était gris.

Au loin, sous la pluie battante, l’on pouvait entendre les cris d’un homme gagné par la colère, la fureur, la haine, la violence, la vengeance.

Jour : Inconnu. Mois : Inconnu. Année : Inconnue.
Journal déchu MV56-H Page 480.
« Ceux sont là mes derniers mots, car je pars, loin.
Je dédis ce journal à mon avenir, et à ce qu’il en deviendra. –tache humide sur le dernier mot-
Si vous lisez ces mots, c’est que vous êtes digne –encore une tache humide- de savoir qui je suis.
J’intitule ce livre des initiales MV56-H, ou le journal de Morte Vales, 56ème édition, l’Hérésie.
Par ce pseudonyme, je cache qui je suis, mais en fait, mon nom est »


Luxure s’empare du journal sur le lit de Shuren et déchire le bas de la 480ième page, avant de verser quelques larmes pour cette dernière. Elle le met dans son sac de voyage, puis une voix interrompt le silence du château.

_ Tout est prêt, nous partons, dit une silhouette dans l’embrasure de la porte.
_ Siyo Ezekiel, j’arrive, je réglais juste quelque chose …
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